Histoire de Valencia

[Mois de l’Histoire des Noirs, édition 2023]

En ce mois de l’Histoire des Noirs, nous célébrons l’implication des artistes et des professionnels des communautés noires du Québec. Nous avons à cœur de promouvoir l’édition 2023 du mois de l’Histoire des Noirs qui a pour thème : de l’obscurité à la lumière.

Dans cet article, Couleurs d’enfants | la clé de l’intégration est allé à la rencontre de Valencia, artiste et ancienne éducatrice à l’enfance. Née en Ontario d’une mère originaire de Rouyn-Noranda et d’un père d’origine haïtienne, Valencia a accepté de partager son histoire vécue et de mettre en lumière des pistes de réflexion pour améliorer l’inclusion des enfants mixtes du Québec.


Bonjour Valencia, raconte nous ton histoire.

Je m’appelle Valencia, j’ai 31 ans et je suis ontarienne de naissance. Ma mère est originaire de Rouyn-Noranda et mon père est d’origine haïtienne. Quand j’ai eu 2 mois, ma famille est revenue s’installer au Québec. Tout comme ma mère, j’ai grandit une bonne partie de ma vie à Montréal.

Je travaille présentement dans le milieu des arts et plus précisément pour la compagnie Danse sur saut qui a lancé le premier festival contemporain destiné aux jeunes.  Ça me fait du bien, car je renoue ainsi  avec mes premières passions: la danse et le mouvement. Des passions qui m’ont aidé à m’exprimer lorsque j’étais enfant. 

J’ai débuté la danse à l’âge de 4 ans et j’ai poursuivi jusqu’à l’âge de 19 ans en combinant sport, étude et danse au secondaire. Comme j’ai vécu des trucs assez difficiles durant mon enfance, j’ai pu ainsi libérer des tensions dont je n’étais pas consciente. C’était mon exutoire et un moyen de socialiser. Je ne parlais pas beaucoup et j’étais extrêmement gênée.

Est-ce possible de nous partager les trucs difficiles que tu as vécu durant ton enfance ?

Je suis proche de ma famille, nous avons une bonne relation, mais ma mère avait de la difficulté à me comprendre. Je ressentais qu’elle voulait m’aider mais qu’elle éprouvait un sentiment d’impuissance face à ce que je vivais. Par ailleurs, je me rendais compte que certaines personnes de mon entourage avaient parfois des propos racistes.

C’est très frais dans ma mémoire. Certains des enfants me disaient « Non toi, tu ne peux pas jouer avec nous parce que tu es noire ». Heureusement, quand j’en ai parlé aux intervenants, ils ont rapidement réagi. En outre, cette période a été difficile pour moi parce que je ne voyais plus mon père et que j’avais bien du mal à m’aimer moi-même. J’arrachais la peau de mes lèvres. Je ne voulais plus être noire. Cette partie de moi, je l’associais à la douleur profonde que je ressentais de ne plus voir mon père. En plus, on me rejetait à l’école parce que j’étais noire. Les enfants me disaient « Ah, t’es sale! Tu t’es pas lavé! », même si j’étais propre. Par contre, les intervenants du centre de la petite enfance, que j’ai fréquenté à l’époque, prenais bien soin de moi. Ils ont toujours été ouverts et gentils. J’en garde de très beaux souvenirs contrairement à l’école primaire.

J’ai été éducatrice à l’enfance pendant quelque temps. J’ai adoré cette période qui m’a permis d’être un modèle mixte pour les enfants. J’aurais beaucoup aimé avoir une éducatrice ou un(e) professeur(e) mixte à ce moment de ma vie, je me serais surement sentie plus accueillie et comprise. De plus, il n’y avait pas de modèle mixte ou noir dans les livres à l’école sur lequel je pouvais me reposer et m’identifier. Ce fût vraiment une période difficile.

Aujourd’hui, qu’elles répercussions ces expériences vécues ont eu sur toi ?

différenceAujourd’hui, j’essaie de m’entourer davantage de personnes issues de communautés diversifiées. Dans mon entourage, je connais très peu de personnes mixtes ou qui partagent d’autres cultures que la mienne. Comme j’ai vécu de l’exclusion une bonne partie de ma vie, j’essaie de m’entourer de personnes différentes.

Quel (s) conseil (s) aimerais-tu transmettre pour mieux inclure les enfants mixtes du Québec ?

Historiquement, au début de la colonisation, l’étiquette « métisse » était associée à un enfant né d’une personne européenne et d’une personne autochtone. Par ailleurs, l’étiquette « mulâtre », selon le dictionnaire Robert, désigne un enfant né d’une personne blanche et d’une personne noire. À priori, ça n’a rien de négatif, mais lorsqu’on creuse un peu plus, on découvre que le terme provient de l’espagnolmulatto” et qu’il signifie “mulet”, soit le résultat de l’accouplement d’un âne et d’une jument.

Lorsque j’étais plus jeune, les adultes me qualifiaient de «mulâtre». Tout comme mon entourage, je ne savais pas alors que le terme était péjoratif, ça ne me dérangeait pas . Aujourd’hui, j’essaie de me détacher de toutes ces étiquettes qui ne me correspondent pas et qui ne m’appartiennent pas. Pour grandir sainement, il faut choisir de se définir en fonction de son histoire et de son vécu. C’est pour ces raisons que j’ai choisi de partager mon histoire en tant que québécoise mixte. Tout ça pour dire qu’il faut se définir soi-même si on n’a pas un vocabulaire adéquat pour le faire. L’identité est un concept à la fois embêtant et lourd de sens pour un adulte. Imaginez pour un enfant ! Pour mettre en lumière mon identité mixte, j’ai choisi la danse et les arts visuels. Deux modes d’expression que j’utilise pour partager auprès du public.

Pour découvrir les œuvres d’arts de Valencia riches en mouvement et en identité mixte,

Valencia Art design

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Pour connaître la programmation du mois de l’Histoire des Noirs 2023, cliquez ici : https://www.moishistoiredesnoirs.com/

Patrimoine Canada : trousse outils numériques pour le mois de l’Histoire des Noirs: https://www.canada.ca/fr/patrimoine-canadien/campagnes/mois-histoire-des-noirs/trousse-outils.html